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épouser une sotte est pour n'être point sot


"Epouser une sotte est pour n'être point sot.
Je crois, en bon chrétien, votre moitié fort sage ;
Mais une femme habile est un mauvais présage ;
Et je sais ce qu'il coûte à de certaines gens
Pour avoir pris les leurs avec trop de talents."
L'Ecole des femmes, I, 1 (v. 82-86)

L'idée qu'épouser une femme sotte constitue l'unique moyen de ne pas être cocu est partagée par le héros de La Précaution inutile (1655) de Scarron (1) et par celui de La Précaution inutile de d'Ouville (1656) (2).

Tandis qu'Arnolphe va jusqu'à préférer épouser "une laide bien sotte" à une femme d'esprit, Chrysalde, conformément aux thèses défendues par certains contemporains, défendra au contraire l'idée qu'une femme idiote est incapable de "savoir ce que c'est d'être honnête", et qu'il n'est pas souhaitable d'"avoir toute sa vie une bête avec soi".


(1) Dans La Précaution inutile (1655) de Scarron, Dom Pèdre refuse d'avoir le moindre commerce avec une femme spirituelle, et cherche la femme la plus sotte qui soit :

C'est ce qui me fait avoir pitié de vous, lui dit alors Dom Pèdre. Et pourquoi ? lui demanda Dom Rodrigue. Parce qu'une femme d'esprit vous trompe tôt ou tard, lui répondit Dom Pèdre.Vous savez, ajouta-t-il, par le récit que je vous ai fait de mes aventures, comment il m'en a pris ; et je vous jure que si j'espérais trouver une femme aussi sotte qu'il y en a de spirituelles, je mettrais au jour pour elle tout ce que je sais de galanterie, et la préférerais à la sagesse même, si elle voulait me choisir pour son galant.
(La Précaution inutile de Scarron (extrait), p. 59-60)

et toujours se confirmant dans son opinion qu'on ne pouvait être sûrement marié avec une femme d'esprit.
(p. 261)

il lui dit même [à une duchesse rencontrée sur sa route] qu'il avait enfin résolu de se marier s'il trouvait une femme assez idiote pour ne lui faire point craindre tous les mauvais tours que les femmes spirituelles peuvent faire à leurs maris.
(La Précaution inutile de Scarron (extrait), p. 106)

il se promit bien de ne se jamais mettre dans le péril d'être mal marié, ou en ne prenant jamais de femme, ou en la prenant si sotte qu'elle ne sût pas discerner l'amour de l'aversion.
(p. 271)

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(2)

[D. Fadrique] prit le chemin de Madrid, avec sa première résolution, d’abhorrer plus que la mort toutes les femmes d’esprit, qui se fiant en leur savoir tâchent à tromper les hommes.
(La Précaution inutile de d'Ouville, p. 49)

Je vous jure cher ami, lui [Don Juan] répliqua D. Fadrique, que j’ai sujet de haïr plus que la mort les femmes qui ont tant d’esprit, j’en voudrais pouvoir trouver une qui ignorât toutes les choses du monde, et qui fût aussi sotte que vous m’exagérez celle-ci fine et spirituelle, pourvu qu’elle eût de la jeunesse et de la beauté, je vous proteste que ce serait la seule que je voudrais aimer et servir. Mais elles sont toutes si rusées et si subtiles, qu’il n’y a point d’homme qui n’y soit attrapé, elles savent toutes aimer, et tromper ; ainsi j’ai une telle appréhension de ces femmes si fort entendues, que je ne veux dorénavant brûler d’amour que pour une sotte.
(La Précaution inutile de d'Ouville, p. 57)

[à Naples] il lui arriva mille aventures qui le confirmèrent encore davantage dans l’opinion qu’il avait assez justement conçue, que les femmes d’esprit étaient le fléau des hommes, et qu’elles étaient capables de tout perdre par leurs ruses, et subtilités.
(La Précaution inutile de d'Ouville, p. 87)

Je vous assure, Madame lui dit D. Fadrique, que je reviens si confus, et si étonné de l’esprit des femmes habiles, que je me laisserais captiver bien plus volontiers, par une sotte, encore qu’elle fût laide que par toutes les autres qualités que vous me marquez : à mon avis une femme n’a besoin d’autre chose, que de savoir aimer son mari, garder son honneur, et nourrir ses enfants, toutes les autres qualités sont superflues en elles.
(La Précaution inutile de d'Ouville, p. 92-93)

Si je puis je me délivrerai de leurs fourberies ou en ne me mariant jamais, ou en cherchant une femme si simple, et si innocente, qu’elle ne sache ce que c’est d’aimer, ni de haïr, ni connaître de quelle couleur est la finesse, et la tromperie.
(La Précaution inutile de d'Ouville, p. 105)




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